La revanche des orages de Sébastien Spitzer
Claude Eatherly est originaire du Texas. Petit gars de la ferme, et petit dernier maladroit d’une fratrie de 6 enfants, il est celui que l’on surnomme le «Manque au but». Il s’est engagé dans la guerre par mimétisme. Lorsque le Japon attaque Pearl Harbour, il fait comme tous les autres, plus pour ne pas décevoir que par patriotisme. Le voilà dans l’armée de l’air.
Anna est Italienne, belle, fougueuse mais inspire la défiance. Ce n’est pas bien vu d’être italienne alors elle s’emploie à camoufler ses origines. Elle a manqué de tendresse étant enfant, c’est pourquoi elle aime aimer. C’est pour combler tout ce manque qu’elle est devenue comédienne.
« Elle se jette toute entière contre le coeur des hommes pour éveiller le sien. »
Elle épouse son beau pilote et se retrouve mère de famille.
Lorsque Claude tarde à revenir de mission, la vie d’Anna à la ferme chez sa belle famille tourne au cauchemar. Elle a renoncé à ses rêves et se sent enfermée dans une prison, engoncée dans son rôle de mère qui attend son héros de mari parti gagner la guerre.
« Hiroshima. La bombe qui a mis fin à cette foutue guerre. C’est lui ! »
Lorsqu’il reviendra, ce sera hanté par des démons, des remords et de la culpabilité. Habité par une voix, jusqu’à devenir psychotique.
Anna veut fuir cette vie peu exaltante à laquelle elle n’était pas préparée
Elle est la femme de l’homme qui a mis fin à la guerre. Mais le héros est enkysté dans des pensés opaques, il devient sec, morne, sans rêve et tourmenté par cette voix qui ne le lâche pas, qui creuse sa conscience et lui brouille le cerveau jusqu’à être interné et à se gaver de pilules, de bains glacés et d’électrochocs.
Il lui est impossible de faire face à l’horreur des conséquences de la bombe : « Little Boy »
« j’ai levé mes bras pour protéger mes yeux.
J’ai senti la brulure d’une chaleur infernale. Ma tunique, mon dos, ma nuque, mes cuisses et mes mollets torturés par mille millions de lames brulantes. J’avais la peau d’une truie qu’on venait de passer au gril. Brune. Sèche. Sale. Des tas de menaces mortelles bouleversaient mes narines et ma bouche et le fond de ma gorge. »
La chasse aux sorcières est ouverte, il faut se taire. Respect et fidélité sont de mise. Gloire à la patrie et aux héros de guerre. Et la conscience des soldats alors ? Ils peuvent bien s’asseoir dessus, vivre avec leur culpabilité et s’autodétruire de remords ! Ils ne sont, eux et leur famille, que des dommages collatéraux, héros de guerre tourmentés devenus des zinzins qu’on doit enfermer pour faire taire la voix des démons : La voix des rescapées, défigurées, condamnées à une semi-existence.
Un thème poignant, surtout lorsque comme moi on a visité le mémorial d’Hiroshima. Un roman très bien écrit qui se lit facilement. Néanmoins, il m’a manqué un petit quelque chose pour que cet ouvrage laisse une trace indélébile à la hauteur du sujet.
J’ai trouvé quelques longueurs qui rendent le récit moins intense qu’il aurait pu l’être. En revanche les personnages sont travaillés et profonds. Cet homme qui perd le nord à cause de sa culpabilité ne laisse pas insensible. J’ai également été touchée par Anna et sa désillusion.
Un récit qui met en avant les conséquences dévastatrices des guerres, et pas uniquement sur les victimes directes, sur la gloire et le remords, le portrait profondément humain d’un héros malgré lui.
C’est un ouvrage qui mérite sa chance et sera perçu différemment en fonction de la sensibilité et du passif de chaque lecteur.
📚 Résumé :
Voici l’histoire vraie du jeune pilote Claude Eatherly qui, le 6 août 1945, a participé au bombardement d’Hiroshima. Démobilisé, il est accueilli en héros mais s’enferme dans le mutisme. Une étrange voix le hante. Qui est-elle ? Que veut-elle ? Et si c’était la voix de sa conscience ? Tandis que les autorités le font passer pour fou, Eatherly entraîne sa femme et ses enfants dans une chute inexorable.
Dernière mise à jour le 2024-12-06 / Liens affiliés / Images de l'API Amazon Partenaires